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Les dangers de l'accouchement à domicile, remis en lumière par le récent décès d'une femme et de son bébé, sont régulièrement rappelés par nombre de médecins. Mais le sujet reste controversé, alors que la recherche peine à évaluer le degré réel des risques.
"Dans la situation française actuelle, il est beaucoup plus dangereux d'accoucher à domicile que dans un milieu médicalisé", juge auprès de l'AFP Joëlle Belaisch Allard, présidente du Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), quelques jours après la mort d'une femme et de son nouveau-né près de Rennes.
Ces décès ont eu lieu à l'occasion d'un accouchement à domicile, sous la supervision d'une sage-femme. Un transfert à l'hôpital, pour une césarienne, n'a pu sauver ni la mère ni l'enfant.
Pour une part du corps médical, ce drame illustre les risques inhérents à l'accouchement accompagné à domicile. Rare en France avec moins de 1% des naissances, ce choix - à distinguer de la pratique encore plus marginale de l'accouchement sans aucune supervision -, fait régulièrement l'objet de vives critiques de la part des médecins.
"Nous ne pouvons pas cautionner cette pratique où le risque de mortalité maternelle et du bébé est nettement plus élevé", insiste Mme Belaisch Allard.
Avec d'autres organisations de médecins (anesthésistes réanimateurs, urgentistes...), son collège a donc redit son opposition, dans un communiqué publié dimanche.
Mais, au-delà de ce front médical, les positions sont moins unanimes, que l'on aille regarder à l'étranger ou que l'on s'intéresse à d'autres professions.
En France, les sages-femmes ne se prononcent pas en bloc contre l'accouchement à domicile. Et, dans d'autres pays comme les Pays-Bas et le Royaume-Uni, les sociétés savantes médicales sont bien plus ouvertes à cette pratique.
Ces divergences témoignent d'une controverse de longue date. Pour de nombreux docteurs, le choix d'accoucher à domicile est difficilement compréhensible, au vu de la sécurité apportée par les ressources d'un hôpital, et va à l'encontre des progrès de la médecine.
Mais pour d'autres soignants, il est important de permettre aux patientes de choisir un environnement connu et moins anxiogène, à partir du moment où elles présentent peu de facteurs de risques.
- Des études divergentes -
Entre médecins et sages-femmes, "il y a deux façons de penser la grossesse et l'accouchement qui sont complètement différentes, les uns axés sur la pathologie et le risque, les autres plutôt sur la normalité", souligne auprès de l'AFP la sociologue Béatrice Jacques, spécialiste des problématiques de périnatalité, rappelant néanmoins que les sages-femmes sont elles-mêmes très divisées sur l'accouchement à domicile.
Les études sur le sujet permettent-elles de trancher le débat ? Pas réellement car, si elles sont nombreuses, elles sont contradictoires quant au risque réellement représenté par l'accouchement à domicile.
Parmi les plus négatives, une vaste étude réalisée aux Etats-Unis en 2013 estime qu'un accouchement accompagné à domicile débouche quatre fois plus souvent qu'à l'hôpital sur d'importants problèmes neurologiques chez le nourrisson. Elle a été publiée dans le journal de la société américaine des gynécologues obstétriciens, opposée comme son homologue française à l'accouchement à domicile.
Mais une autre étude de référence, publiée dans le BMJ en 2011 et réalisée en Angleterre, est nettement moins tranchée. Certes, les complications sont légèrement plus fréquentes à domicile lors du premier accouchement d'une femme sans facteur de risque, mais la différence est faible par rapport à l'hôpital.
Surtout, les auteurs, qui se prononcent pour faciliter le libre choix des femmes sur leur lieu d'accouchement, soulignent que les complications restent rares quel que soit le lieu d'accouchement.
Mais ils admettent un point crucial: il est difficile de généraliser ces conclusions à d'autres pays. Si les accouchements à domicile restent peu fréquents au Royaume-Uni, le système de soin y est largement préparé avec notamment la mobilisation systématique d'une ambulance pour parer à d'éventuelles complications.
"Tout dépend de l'organisation des soins périnataux", admet Mme Belaisch Allard, pour qui un accouchement doit toutefois être systématiquement considéré à risque.
"Actuellement en France il n'y a pas d'organisation qui permette d'accoucher à domicile dans de bonnes conditions", assure-t-elle, reconnaissant néanmoins l'absence d'étude qui mesure les risques d'accoucher chez soi dans le pays.
A.Maldonado--TFWP