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Nikolas Ferreira est un jeune ultraconservateur brésilien qui prêche la politique dans les églises et sur les réseaux sociaux. Célia Xakriaba est une militante indigène déterminée à placer l'urgence climatique au centre du débat public.
Récemment élus députés au Parlement fédéral, ils sont les soldats de campagne de Jair Bolsonaro et de Luiz Inacio Lula da Silva dans leur Etat du Minas Gerais (sud-est). Celui où depuis 1989, le candidat qui l'emporte est élu président du Brésil.
- Nikolas Ferreira l'influenceur en "guerre" -
Avocat et influenceur sur les réseaux sociaux de 26 ans, affilié au Parti libéral (PL) du président d'extrême droite, Nikolas Ferreira a été le député qui a recueilli le plus de voix (près de 1,5 million) lors des législatives organisées en parallèle du premier tour de la présidentielle.
Depuis des mois, il se dit en "guerre" contre la "menace silencieuse du communisme", qui sera à l'oeuvre si Lula, le candidat de gauche favori des sondages, l'emporte.
"Allons-nous renverser la situation ou non ? Avortement oui ou non ? Légalisation des drogues oui ou non ?", a lancé M. Ferreira lors d'un rassemblement de campagne au côté de son candidat.
Visage tout en longueur, yeux noirs expressifs et sourcils broussailleux, Nikolas Ferreira, avec un discours prononcé comme par un pasteur évangélique, capte l'attention des foules. Il est considéré comme l'un des potentiels héritiers du bolsonarisme.
"Il y a des croyants qui votent pour le diable. Il y a des croyants qui votent pour Lula", a-t-il lancé à la radio.
Diplômé de l'Université catholique pontificale du Minas Gerais, il affirme que les universités brésiliennes sont sous la coupe d'une "idéologie marxiste" qui cherche à détruire la famille traditionnelle.
Il propage son discours lors de multiples conférences publiées pour ses millions d'adeptes sur les réseaux sociaux, où il est devenu une figure de proue des jeunes conservateurs.
Il a dû supprimer sur ordre de la justice électorale les contenus où il affirmait à tort que Lula était pro-avortement ou favorable à la légalisation des drogues.
"Je ne suis pas polémiste, je ne fais que suivre ce en quoi je crois", a-t-il affirmé lors d'une récente interview.
- Célia Xakriaba, résistante indigène -
A 32 ans, Célia Xakriaba est convaincue de vivre un "moment historique". Sous la bannière du Parti socialisme et liberté (PSOL), elle est devenue la première députée indigène du Minas Gerais.
"Notre priorité absolue portera sur les questions environnementales", a-t-elle affirmé à l'AFP lors d'une réunion de campagne en soutien à Lula dans la capitale régionale, Belo Horizonte.
Originaire du territoire de Xakriaba, dans le nord du Minais Gerais, elle poursuit un doctorat en anthropologie. Coiffe de plumes jaune-vert sur ses long cheveux noirs, peinture rouge sur le visage, elle se prête aux photographies en faisant le "L" de Lula avec le pouce et l'index.
Elle explique avec détermination comment elle compte affronter le puissant agronégoce brésilien qu'elle rend coupable des records de déforestation en Amazonie sous le gouvernement Bolsonaro.
"Nous, les peuples indigènes, savons depuis plus de 500 ans ce qu'est la résistance. Comment pouvons-nous accepter un président qui dit qu'il ne donnera pas un centimètre de plus de terre aux indigènes ?", déclare-t-elle en référence à une déclaration polémique de Jair Bolsonaro en décembre 2018, peu après son élection. La démarcation de territoires réservés aux autochtones est au point mort depuis son arrivée au pouvoir.
Membre de la délégation indigène qui a fait un tour d'Europe en 2019 pour dénoncer les "graves violations" de l'exécutif, Célia Xakriaba a participé à la COP26 à Glasgow fin 2021.
"L'Amérique latine et le Parlement européen attendent le résultat de cette élection", dit-elle.
Elle estime que les voix qui se sont portées sur elle n'étaient pas forcément celles de sympathisants de Lula mais provenaient de personnes soucieuses d'égalité des sexes ou de défense de l'environnement.
Cette présidentielle ne se résume pas au choc de deux personnalités que tout oppose. Beaucoup "ne voient pas qu'il s'agit d'un projet de vie et d'un projet de mort", assure-t-elle.
"Si la planète n'a plus de ressources pour nous, elle n'en a plus non plus pour vous, pour vos enfants, pour toute l'humanité", affirme la jeune députée.
"Celui qui déboise, tue".
G.Dominguez--TFWP