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Le brasseur japonais Kirin a annoncé lundi renoncer à son activité en Birmanie pour mettre fin à sa coentreprise locale avec une structure contrôlée par la junte, imitant ainsi d'autres entreprises étrangères depuis le coup d'Etat de février 2021.
Kirin a "commencé les discussions" avec son associé local Myanma Economic Holdings Limited (MEHL) pour "se retirer de l'activité en Birmanie" en mettant fin à leur coentreprise "aussi vite que possible", selon un communiqué du groupe nippon.
Sollicité par l'AFP, un porte-parole de la junte birmane n'était pas immédiatement disponible pour réagir à la décision de Kirin.
Après le putsch militaire, Kirin avait d'abord tenté de négocier pour trouver un nouveau partenaire pour sa coentreprise en Birmanie, sans quitter le marché local, mais ses propositions avaient été rejetées par MEHL, un conglomérat opaque contrôlé par l'armée.
Les deux partenaires s'étaient par la suite affrontés sur le terrain judiciaire en Birmanie. Kirin avait contesté un projet de dissolution de la coentreprise par MEHL, redoutant une procédure de liquidation non équitable.
En fin d'année dernière, le groupe japonais avait amorcé une procédure d'arbitrage commercial à Singapour dans l'espoir de régler son différend avec MEHL.
Leur coentreprise Myanmar Brewery Limited, dont les boissons comprennent la marque phare Myanmar Beer, se targuait d'une part de marché de près de 80% dans le pays il y a encore quelques années.
- Un marché modeste pour Kirin -
Kirin avait profité de la levée des sanctions occidentales en Birmanie au début des années 2010, au moment de la transition démocratique alors en cours dans le pays, pour acquérir 55% de Myanmar Brewery pour 560 millions de dollars en 2015.
Il avait aussi acquis en 2017 pour quelques millions de dollars supplémentaires 51% des parts d'un plus petit brasseur local, Mandalay Brewery Limited.
Avant même le retour au pouvoir de la junte il y a un an, les liens d'affaires de Kirin avec l'armée birmane étaient très critiqués par des organisations de défense des droits humains, surtout à partir du début de la crise des Rohingyas en 2017.
Mais la Birmanie était un marché mineur pour Kirin, qui avait réalisé à peine 2% de ses ventes totales dans le pays sur son exercice 2019/20.
Les perturbations économiques liées au Covid-19 et aux troubles politiques ont par ailleurs fait plonger de 30% les ventes de sa coentreprise locale l'an dernier, a souligné Kirin dans une présentation sur ses résultats annuels, publiés lundi.
Le marché de la bière en Birmanie a chuté de 20% sur la même période, toujours selon le groupe.
Plusieurs grands groupes internationaux ont déjà annoncé leur départ du pays, comme récemment le français TotalEnergies, l'américain Chevron et l'australien Woodside dans l'énergie, et dès l'an dernier le cigarettier britannique BAT et l'opérateur télécoms norvégien Telenor.
En fin de semaine dernière, le géant taïwanais du fret maritime Evergreen a aussi annoncé que ses bateaux éviteraient désormais le port de Rangoun, la capitale économique birmane.
"Nous saluons la décision de Kirin de finalement cesser son activité avec MEHL", a réagi dans un communiqué l'ONG prodémocratie Justice for Myanmar.
Mais en premier lieu, "Kirin n'aurait jamais dû nouer des relations d'affaires" avec l'armée birmane "brutale et corrompue", a ajouté cette ONG.
"MEHL finance directement l'armée birmane", et ainsi les "lucratives" activités brassicoles de Kirin en Birmanie ont financé des crimes atroces et enrichi les principaux généraux" de la junte, a encore dénoncé Justice for Myanmar.
Depuis la prise de pouvoir par l'armée et l'arrestation de la dirigeante civile et prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi, la répression des opposants au putsch a fait plus de 1.500 morts parmi la population civile en Birmanie, selon les dernières estimations. Les violences continuent et tendent à se transformer en une guerre civile larvée.
burx-etb/ras/abx
M.Cunningham--TFWP