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A chaque séance plénière à Strasbourg, les eurodéputés adoptent des résolutions condamnant des violations des droits humains aux quatre coins de la planète. Mais quelle est la réelle portée de ces textes non contraignants? Certains s'interrogent.
"Tout cela ne sert à rien!", a lancé cette semaine l'eurodéputé français Mounir Satouri, qui préside la sous-commission en charge des droits de l'homme. Et de citer les votes répétés de résolutions d'urgence sur les prisonniers politiques en Azerbaïdjan ou sur les femmes iraniennes.
Depuis les élections européennes de juin, le Parlement a voté quelque 21 résolutions d'urgence.
Toutes ces causes sont bien sûr "légitimes", explique l'élu à l'AFP. Mais "cela manque de cohérence par rapport à ce qui se passe dans le monde", ajoute-t-il regrettant par exemple que les situations à Gaza ou au Soudan n'aient, elles, pas fait l'objet de résolution.
"On a besoin d'une résolution sur la Tunisie" où la situation des droits humains est menacée, expose-t-il ainsi. Or, mois après mois, "la discussion entre les différents groupes politiques ne permet pas de dégager de majorité" pour soumettre un texte aux eurodéputés, regrette-t-il, accusant droite et extrême-droite d'obstruction.
En revanche, la situation en Azerbaïdjan, qui a déjà fait l'objet de résolutions en octobre puis en décembre, a de nouveau été mise à l'agenda cette semaine avec un vote prévu ce jeudi.
"S'il faut voter tous les mois pour défendre les droits de l'homme, je le ferai tous les mois", rétorque François-Xavier Bellamy, eurodéputé français membre du PPE (chrétien-démocrate), le principal groupe au Parlement de Strasbourg.
- "On prend acte" -
Pour Mounir Satouri, il faudrait surtout que ces textes adoptés par le Parlement à Strasbourg provoquent "une réaction des institutions". "Ces résolutions ne sont pas faites pour faire plaisir aux députés!", tempête-t-il.
A Bruxelles, où se trouvent la Commission européenne et le Conseil qui rassemble les Etats membres, "on tient à peine compte" de ces résolutions, reconnaît un diplomate européen.
Et lorsqu'elles dénoncent la situation des droits humains dans des pays avec lesquels l'Europe maintient des relations étroites, "on prend acte en soulignant le caractère non contraignant" de ces textes, explique un autre. Une manière de dire aux pays concernés que rien n'oblige les 27 à réagir, comme ce fut le cas dernièrement avec l'Egypte ou le Maroc.
Ces résolutions, même non contraignantes, ont cependant un impact: les Etats n'aiment pas être épinglés. D'autant que tout le monde ne fait pas toujours la distinction entre les différentes institutions européennes et que le message qui reste in fine est souvent que tel ou tel pays a été pointé du doigt "par l'UE".
Ces votes "peuvent être utiles, mais sans toujours avoir l'impact désiré, faute d'un suivi plus conséquent", juge de son côté Hussein Baoumi, un des responsables du bureau bruxellois d'Amnesty International, qui déplore que certains pays ne soient jamais à l'agenda du Parlement européen.
La meilleure réponse à la question de l'utilité de ces dizaines de textes votés chaque année par les eurodéputés a sans doute été donnée mardi dans l'hémicycle du Parlement à Strasbourg par l'ex-prisonnière politique bélarusse Palina Charenda-Panassiouk.
"J'ai été libérée, en partie grâce aux positions" prises par le Parlement européen, a ainsi affirmé, les larmes aux yeux, celle qui a passé quatre ans en détention dans son pays.
M.T.Smith--TFWP