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Le président élu du Mozambique, Daniel Chapo, a été investi dans une capitale quadrillée par la police après des mois d'une contestation post-électorale à nouveau meurtrière mercredi, que le principal opposant a appelé à poursuivre, exhortant à "paralyser" le pays.
Sur la place de l'Indépendance de Maputo, survolée par des hélicoptères et avions des forces de sécurité, Daniel Chapo, à la tête du parti au pouvoir depuis un demi-siècle dans ce pays d'Afrique australe, a juré de "remplir fidèlement la fonction de président de la République" pour les cinq prochaines années.
En parallèle de cette cérémonie, sept personnes ont été tuées dans des manifestations, a annoncé l'ONG locale Plataforma Decide, qui a recensé ces décès dans la capitale Maputo et dans le nord à Nampula. Contacté par l'AFP, un porte-parole de la police n'était pas en mesure de commenter.
Dans son discours inaugural, celui qui est devenu le premier président né après l'indépendance en 1975 n'a pas explicitement évoqué ces violences, associant simplement à la minute de silence en mémoire des 120 morts causées par le cyclone Chido "ceux qui, tout au long de cette période, ont perdu la vie, ont été blessés ou ont subi des pertes irréparables".
"Unis, nous sommes capables de surmonter les obstacles et de transformer notre douleur en prospérité", a-t-il prêché.
Après bientôt trois mois de violentes émeutes, accompagnées de grèves, blocages et vandalisme, la première mission du nouveau président, âgé de 48 ans, est de trouver une sortie de crise et restaurer la stabilité dans son pays pauvre et inégalitaire.
L'opposition, avec à sa tête Venancio Mondlane, dénonce inlassablement une élection "volée" par le parti Frelimo. Mais en dépit de la contestation, le pouvoir "n'a fait aucune concession", relève l'historien Eric Morier-Genoud.
Conscient de l'ampleur du mécontentement, Daniel Chapo, crédité de 65% des voix en dépit de nombreuses irrégularités, a livré un discours de rupture, promettant mercredi la "fin de la corruption, de la désorganisation et du manque de transparence" de l'Etat.
- Manifestations sans fin -
"Le gouvernement est prêt à se serrer la ceinture et à montrer l'exemple", a-t-il assuré, proposant de "bâtir ensemble une nation plus propre, plus efficace".
Son prédécesseur Filipe Nyusi n'avait pas engagé de discussions directes avec Venancio Mondlane, ancien parlementaire et chroniqueur télé de 50 ans, qui mène l'opposition.
Daniel Chapo, jusque-là un obscur gouverneur provincial sans expérience de gouvernement et choisi par défaut par son parti, a répété ces derniers mois qu'il parlerait avec "tout le monde".
"Venancio" a appelé à des manifestations cette semaine, menaçant de les poursuivre encore longtemps.
Rentré la semaine dernière d'un exil qu'il s'était imposé après l'assassinat de deux de ses proches en octobre, "VM", comme l'appelle aussi la rue, s'est indigné mardi de la violence du pouvoir.
"Comment cela va-t-il finir?", a-t-il demandé sur Facebook. "Ce régime ne veut pas la paix", accuse l'opposant. "S'il le faut, nous manifesterons tous les jours, 365 jours par an."
Pour Johann Smith, analyste en risques politiques, le Frelimo risque d'avoir bien du mal à calmer le jeu.
Le président sud-africain a été l'un des rares chefs d'Etat, avec celui de la Guinée-Bissau, à assister mercredi à l'investiture.
"Même au niveau régional, on hésite à reconnaître que Chapo a gagné les élections, le scrutin s'est avéré si imparfait et injuste pour les citoyens", note M. Smith.
Pour sortir de l'impasse, Daniel Chapo pourrait annoncer une sorte de commission pour réfléchir à des réformes, afin de gagner du temps, souffle un expert qui tient à rester anonyme.
Il pourrait aussi intégrer, dans son gouvernement qui devrait être annoncé dans les 48 heures, des ministres issus de l'opposition et de la société civile.
S.Jordan--TFWP