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Sous le coup d'un mandat d'arrêt, le président sud-coréen déchu Yoon Suk Yeol reste retranché dans sa résidence jeudi, promettant de "se battre jusqu'à la fin" contre les autorités qui cherchent à l'interroger sur sa tentative ratée d'imposer la loi martiale.
Depuis son coup de force du 3 décembre, M. Yoon n'a montré aucun regret et son refus systématique de se soumettre aux questions des enquêteurs fait redouter qu'une tentative d'arrestation ne dégénère en violences, aggravant encore la grave crise que traverse la quatrième économie d'Asie.
Le Bureau d'enquête sur la corruption des hautes personnalités (CIO), qui centralise les investigations, a jusqu'au 6 janvier pour exécuter le mandat d'arrêt délivré par un tribunal à sa demande, sans précédent contre un chef d'Etat sud-coréen.
Yoon Suk Yeol reste en effet président sur le papier, suspendu depuis la destitution votée le 14 décembre par le Parlement.
Le président déchu, qui n'a pas le droit de quitter le pays, se trouve dans sa résidence officielle à Séoul, a confirmé son avocat à l'AFP. Son équipe juridique a intenté un recours contre le mandat d'arrêt, soutenant qu'il est "illégal et invalide".
Depuis que le mandat a été lancé mardi, ses partisans et des détracteurs manifestent quasiment en permanence près de sa résidence, s'invectivant mutuellement par-dessus les policiers qui les séparent avec des échauffourées constatées.
"Protégez le président", scandaient des pro-Yoon qui se sont allongés sur le sol pour barrer l'accès à la résidence.
"Nous pensons que le CIO va passer par l'entrée principale (...) pour arrêter le président Yoon et donc nos camarades se sont allongés pour l'en empêcher", a expliqué à l'AFP Rhee Kang-san.
Parmi les opposants, Bae Hoon a indiqué avoir dû reculer face au camp adverse: "La plupart des opposants ont été frappés et agressés à plusieurs reprises par des gens qui arboraient le drapeau national", regrette le manifestant de 46 ans.
- "Délirant" -
Le CIO a demandé un mandat d'arrêt après que le président déchu, qui fait l'objet d'une enquête pour "rébellion" - une crime passible de la peine de mort - a ignoré trois convocations consécutives pour être interrogé.
Yoon Suk Yeol avait sidéré la Corée du Sud dans la nuit du 3 au 4 décembre en imposant la loi martiale et en envoyant l'armée au Parlement pour tenter de le museler, un épisode qui avait rappelé au pays les heures sombres de la dictature militaire.
Il avait été forcé de faire marche arrière quelques heures plus tard, les députés ayant réussi à entrer dans le Parlement et à voter une motion exigeant la levée de la loi martiale pendant que leurs assistants bloquaient les portes de l'hémicycle avec des meubles et que des milliers de manifestants prodémocratie se rassemblaient à l'extérieur.
L'ancien procureur vedette de 64 ans n'a manifesté aucune contrition depuis sa destitution, jurant même de "se battre jusqu'à la fin" dans une lettre distribuée à ses partisans.
"La République de Corée est actuellement en danger en raison des forces internes et externes qui menacent sa souveraineté, et des activités des éléments anti-étatiques", y écrit-il.
Un message "délirant", a dénoncé Jo Seoung-lae, le porte-parole du Parti démocrate, principale force d'opposition, accusant M. Yoon d'incitation à la violence.
Le chef du CIO, Oh Dong-woon, a averti que quiconque tenterait d'empêcher l'arrestation de M. Yoon pourrait lui-même faire l'objet de poursuites.
Un tribunal a par ailleurs délivré des mandats de perquisition pour la résidence officielle de M. Yoon et d'autres endroits, a indiqué à l'AFP un responsable du CIO.
Mais le service de sécurité présidentiel a jusqu'à présent empêché les enquêteurs d'entrer, invoquant une loi interdisant les perquisitions dans les lieux contenant des secrets d'Etat sans l'accord de la personne responsable.
On ignore combien de gardes se trouvent avec M. Yoon, et comment ils réagiront en cas d'arrestation. La ligne officielle du service de sécurité présidentiel est d'obéir aux décisions de justice.
Sur le plan politique, la crise s'est aggravée vendredi quand le Premier ministre Han Duck-soo, qui assurait l'intérim de la présidence, a été à son tour destitué par le Parlement.
Les pouvoirs présidentiels sont désormais entre les mains du ministre des Finances Choi Sang-mok.
Depuis, M. Choi a partiellement accédé à une demande de l'opposition en nommant deux nouveaux juges à la Cour constitutionnelle, dont trois des neuf sièges sont vacants. Cette cour doit se prononcer à la majorité des deux tiers pour confirmer la destitution du président, faute de quoi celui-ci retrouvera automatiquement son fauteuil.
L.Davila--TFWP