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Emmanuel Macron a annoncé mardi aux chefs des partis politiques réunis pendant plus de deux heures et demie à l'Elysée vouloir nommer un nouveau Premier ministre "dans les 48 heures", arrachant quelques avancées mais aussi beaucoup de défiance.
"Les choses ont plutôt avancé" sur un renoncement simultané au 49.3, outil constitutionnel pour passer en force à l'Assemblée nationale, et à la censure, a déclaré à la sortie du palais présidentiel le patron du Parti socialiste Olivier Faure.
De quoi faire dire à François Bayrou, le président du MoDem, l'un des favoris pour Matignon, que la rencontre, qui excluait le Rassemblement national et La France insoumise, avait été "positive de manière inespérée" grâce à un "climat très constructif". Le maire de Pau a évoqué "un accord de coopération démocratique" et proposé de temporiser sur les "questions qui fâchent", comme les retraites et l'immigration.
"On a écarté la piste d'un gouvernement d'union nationale mais la piste d'un accord de non-censure me paraît envisageable", a complété un autre participant. "Encore faut-il que le futur Premier ministre soit d'accord", car il "se lie un peu les mains", a-t-il nuancé.
- "ne plus se mettre dans les mains du RN" -
Mais tous les participants n'ont pas une lecture homogène de cette rencontre collégiale dans le jardin d'hiver de l'Elysée, inédite depuis le début de la crise politique déclenchée par la dissolution de l'Assemblée nationale.
Le camp présidentiel n'était prêt à "aucun compromis, aucune concession", a déploré la cheffe des Ecologistes Marine Tondelier, qui a toutefois salué son engagement à ne "plus se mettre dans les mains du Rassemblement national" pour gouverner.
Et, en réalité, personne ne s'est prononcé mardi sur sa possible participation, ou son éventuel soutien plus ou moins tacite, au futur gouvernement.
Emmanuel Macron "s'est engagé à nommer un Premier ministre dans les 48 heures", "on va attendre de voir" qui il nomme, a expliqué Marine Tondelier, à l'unisson des autres chefs de parti. "Il a clairement dit que c'était ensuite le Premier ministre qui configurerait un peu la suite des discussions."
Selon un allié proche du président, ce dernier espère même nommer mercredi soir le successeur de Michel Barnier, censuré la semaine dernière par l'Assemblée après seulement trois mois à Matignon.
Cette rencontre à huis clos, sans collaborateurs, des communistes à LR en passant par les socialistes, les écologistes et le camp macroniste visait avant tout à conclure un "contrat de méthode" pour éviter une nouvelle censure, a expliqué l'entourage du chef de l'Etat.
La gauche revendique un Premier ministre de gauche qui soit "ouvert aux compromis", a martelé Olivier Faure. Les socialistes refusent de participer à un exécutif dirigé par la droite ou dit "technique".
Pas question de participer "à un gouvernement +d'intérêt général+ avec LR ou des macronistes ou je ne sais qui", a aussi prévenu Marine Tondelier, assurant que son parti n'était pas "naïf".
Mais dans le camp présidentiel, plusieurs cadres assuraient ces derniers jours qu'Emmanuel Macron n'avait pas l'intention de nommer un chef du gouvernement de gauche.
Les noms qui circulent émanent du bloc central, comme celui de François Bayrou, de nouveau reçu mardi matin à l'Elysée en solo, après un déjeuner avec le président la semaine dernière, selon une source au MoDem.
Son éventuelle arrivée à Matignon hérisse la gauche.
Les ministres macronistes Sébastien Lecornu ou Catherine Vautrin sont aussi cités, tout comme l'ex-ministre Jean-Yves Le Drian, qui a décliné selon des sources macronistes, ou des responsables de droite comme le maire de Troyes François Baroin.
Quant à l'ex-Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve, "le président la République nous a assuré que cette option n'était pas sur la table", a assuré Marine Tondelier avant la réunion.
- "loi spéciale" -
En attendant, Michel Barnier présidera mercredi matin un (dernier?) Conseil des ministres pour présenter le projet de "loi spéciale" sur le budget qui permettra notamment à l'Etat de lever l'impôt à partir du 1er janvier, dans l'attente d'un budget pour 2025. Ce texte, dont l'adoption ne fait guère de doute, sera examiné lundi à l'Assemblée.
Pour l'heure, ces consultations ont accentué la division à gauche, les Insoumis n'étant pas invités après avoir refusé un tête-à-tête avec Emmanuel Macron.
"La politique de la chaise vide est une forme d'affaiblissement de la gauche", a commenté le Premier secrétaire du PS pour justifier sa présence à l'Elysée, assurant vouloir chercher une "solution" pour une "sortie de crise".
Le coordinateur de LFI Manuel Bompard a lui appelé le reste du NFP "à ne pas céder aux sirènes et à la tentation du gouvernement national". Et le leader insoumis Jean-Luc Mélenchon a mis en garde depuis Redon, en Bretagne: "Qui pense pouvoir gagner un seul siège sans nous?".
Non convié, le Rassemblement national de Marine Le Pen se félicite de voir Emmanuel Macron lui donner "la médaille de l'opposition", fustigeant des "agapes pour se partager les postes".
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S.Jordan--TFWP