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Le maître zen Thich Nhat Hanh, mort samedi à l'âge de 95 ans au Vietnam dont il a longtemps été banni, était l'un des moines bouddhistes les plus influents au monde, considéré en Occident comme le père de la méditation de "pleine conscience".
Après des décennies d'exil durant lesquelles il a notamment vécu 39 ans en France, Thich Nhat Hanh est mort samedi dans sa ville natale de Hué, au centre du Vietnam, où il vivait depuis son retour dans le pays en 2018. Sa dépouille est exposée pour une semaine dans une pagode de Hué.
Parmi ses adeptes, dans son pays et aux quatre coins du monde, on compte la vedette de la télévision américaine Oprah Winfrey, l'actrice Gwyneth Paltrow et de nombreux patrons des industries high-tech de la Silicon Valley, au premier rang desquels le géant Google chez qui il avait été invité à délivrer son enseignement.
Son message aux décideurs: utiliser leur influence pour se concentrer sur la manière dont ils peuvent contribuer à un monde meilleur, plutôt que d'être obsédés par leur chiffre d'affaires.
La centaine d'ouvrages qu'il a écrits, notamment sur la méditation de pleine conscience fondée sur l'écoute de ses propres sensations, font figure de référence pour une industrie du bien-être qui génère des milliards de dollars dans le monde.
Depuis un accident vasculaire cérébral en 2014, Thich Nhat Hanh ne pouvait cependant plus ni parler ni se déplacer.
Le vieux sage, une des figures les plus engagées du bouddhisme avec le dalaï lama, avait été autorisé à rentrer dans son pays en 2018 pour y finir ses jours.
Thich Nhat Hanh s'était alors installé dans l'ancienne capitale impériale, connue comme le centre du bouddhisme au Vietnam, dans le temple où il a étudié quand il était jeune.
Il s'agissait d'un retour aux sources pour ce moine contraint à l'exil depuis les années 1960 pour avoir appelé à la fin de la guerre du Vietnam. Une position qui lui a valu d'être proposé par Martin Luther King pour le prix Nobel de la paix en 1967.
C'est ainsi que le moine s'est retrouvé à passer près de quarante ans dans le Sud de la France où il a fondé un monastère et un centre de méditation bouddhique accueillant des laïcs pour des retraites.
- Méditer à tout instant -
Dans son propre pays, ses adeptes doivent faire profil bas depuis des années, la liberté religieuse qu'il prône étant vue comme une provocation par le régime communiste à parti unique.
Mais pendant ce temps, son influence a grandi à l'étranger.
États-Unis, Europe, Australie, Thaïlande: des milliers de personnes affluent aujourd'hui dans les centres qui dispensent son enseignement.
On y apprend la pleine conscience et le bouddhisme engagé, qui encourage à ne pas se retirer du monde mais à s'engager.
Avant de perdre l'usage de la parole, Thich Nhat Hanh expliquait d'ailleurs méditer en permanence: en mâchant sa nourriture, en buvant du thé, en marchant et même en faisant la vaisselle.
A partir de 2005, le maître zen avait été autorisé à se rendre pour de courtes visites au Vietnam, mais ses messages sur la tolérance religieuse n'étaient pas du goût des autorités.
En 2009, ses adeptes avaient ainsi été chassés de leur temple dans la province de Lam Dong, dans le Sud du pays.
"Le gouvernement communiste du Vietnam craint tout groupe qui compte de nombreux fidèles. C'est aussi le cas en Chine pour le Falun Gong", discipline réprimée depuis de nombreuses années par les autorités chinoises, soulignait alors Tuong Vu, directeur des études asiatiques à l'Université de l'Oregon aux Etats-Unis.
De retour dans son pays, Thich Nhat Hanh s'était éloigné de ces batailles idéologiques.
"Il n'a plus de combat à mener, il profite pleinement du temps qui lui reste", assurait en 2018 Soeur Dinh Nghiem, son assistante depuis de nombreuses années.
Le journal Cong An Nhan Dan, considéré comme la voix du ministère de la Sécurité publique, a publié dimanche un hommage élogieux à l'écrivain, poète, universitaire, historien et militant de la paix.
"Le moine Thich Nhat Hanh du Village des pruniers (centre bouddhiste dans le Sud-Ouest de la France, ndlr) était un enseignant spirituel qui a exercé une influence profonde et étendue dans le monde entier", souligne l'article.
K.Ibarra--TFWP