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Lanceur d'alerte ou agent double ? Un ex-membre autrichien des services secrets, soupçonné d'avoir échangé avec l'extrême droite des données sensibles, a réfuté mercredi à Vienne tout acte répréhensible sur fond d'accusations d'espionnage pour la Russie.
Sur le banc du tribunal, Egisto Ott fait l'objet d'enquêtes depuis des années pour ses activités présumées troubles.
Le procès, qui devait initialement se terminer vendredi, le jugement étant attendu plus tard, pourrait jouer les prolongations, l'un des témoins ne s'étant pas présenté.
Le parquet reproche au sexagénaire à la carrure imposante d'avoir abreuvé un député d'extrême droite, coaccusé dans cette affaire, d'informations susceptibles de "discréditer" les renseignements.
Selon les procureurs, cela constitue un délit de violation du secret de la fonction, passible de trois ans de prison.
Concrètement, M. Ott est accusé d'avoir recherché, en 2018, le nom de collègues ayant "participé à une réunion" du Club de Berne à Varsovie, la plateforme d'échange des services secrets européens, "sur ordre" de Hans-Jörg Jenewein, alors élu du parti d'extrême droite FPÖ au pouvoir.
- Montés en épingle -
Par la suite, il lui aurait aussi livré l'identité d'employés sous couverture, "mettant en péril le maintien de la sécurité nationale et le succès de futures activités de renseignement", affirme le parquet.
Enfin, il est soupçonné d'avoir cherché à collecter les noms des agents de police enquêtant spécifiquement sur l'Ibizagate, un scandale de corruption impliquant l'extrême droite.
De son côté, l'ex-député a, d'après les enquêteurs, transmis à Egisto Ott des documents confidentiels provenant de commissions parlementaires à huis clos. Une simple "bêtise", selon lui. Là encore, un délit pour le parquet.
A l'ouverture du procès, le procureur a demandé à l'ancien agent si certains de ces éléments devaient ensuite partir pour la Russie, dont le FPÖ était proche à l'époque. L'accusé a qualifié d'"absurde" qu'on le soupçonne d'espionnage pour le Kremlin.
S'ils n'ont pas contesté les faits, largement étayés par des SMS, les deux prévenus ont plaidé non coupable, estimant que de banals échanges avaient été montés en épingle, et ils en ont contesté avec force le caractère illégal.
"On a le droit de partager des informations entre détenteurs du secret de la fonction", a plaidé M. Ott, affirmant n'avoir jamais rien divulgué publiquement, ni mis en danger la sûreté de l'État.
- La piste Marsalek -
Leur but était uniquement de déceler des "dysfonctionnements", a assuré l'un des avocats d'Egisto Ott, Josef Phillip Bischof, selon qui "les attentes de la presse vont être déçues".
"Quelques noms ont été transmis par un fonctionnaire à un organe de contrôle. C'est un crime?", a-t-il demandé à l'audience.
Sauf que ce premier procès est la face émergée d'un iceberg: Egisto Ott est dans le viseur du parquet depuis 2017 pour d'autres dossiers et avait été placé en détention une première fois en 2021, puis au printemps de cette année.
Contacté, il n'a pas souhaité s'exprimer. Mi-mars, il avait nié auprès de l'AFP toutes les allégations.
Dans des enquêtes distinctes qui ne sont pas encore bouclées, il est soupçonné d'avoir fourni des téléphones portables de membres du cabinet du ministre de l'Intérieur aux services de sécurité russes.
Il lui est notamment reproché d'avoir mené des recherches pour Jan Marsalek, recherché par la justice allemande dans le cadre de la faillite de la société de paiements Wirecard et aujourd'hui accusé d'espionnage pour Moscou.
Le passage de l'extrême droite, proche de la Russie, au ministère de l'Intérieur entre 2017 et 2019 avait conduit plusieurs pays occidentaux à limiter leurs échanges d'information avec l'Autriche, un pays neutre, justement par peur des fuites.
Le FPÖ a remporté les élections législatives fin septembre mais l'Autriche est toujours à la recherche d'un gouvernement, aucune formation ne souhaitant s'allier avec lui pour former une majorité, invoquant notamment sa proximité avec Moscou.
A.Williams--TFWP