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La croissance de l'économie japonaise a rebondi de 0,8% au deuxième trimestre 2024 comparé au premier, une reprise plus forte que prévu grâce à un net rebond de la consommation, mais il est encore trop tôt pour pavoiser, estiment des économistes.
Le consensus sondé par l'agence Bloomberg tablait sur une hausse moins forte de 0,6%, après un repli de 0,6% au premier trimestre, selon un chiffre révisé jeudi.
"L'économie japonaise a fait mieux que prévu au deuxième trimestre", a souligné Stefan Angrick de Moody's Analytics.
Mais selon lui, "avec une croissance des salaires et des exportations encore hésitante, il serait prématuré de conclure (qu'elle) est tirée d'affaire", car cette embellie "reflète principalement une certaine normalisation après un premier trimestre exceptionnellement faible".
La consommation privée, qui avait plombé le calcul du PIB de janvier à mars, a ainsi rebondi de 1% au deuxième trimestre.
Elle a notamment bénéficié des réductions d'impôts consenties en juin par le gouvernement pour tenter de lutter contre l'inflation, et des hausses de salaires qui commencent à être mises en place à la suite des négociations annuelles de printemps.
Ces tractations avaient abouti cette année à la promesse d'une hausse inédite de 5,58% des salaires dans les grandes entreprises japonaises, mais certains analystes se montraient sceptiques quant à leur capacité à bénéficier à la plus grande partie de la population.
- Incertitude sur la BoJ -
"Le pire pour les consommateurs japonais est probablement derrière nous", a noté Marcel Thieliant de Capital Economics. "Certes, le bond des salaires réels en juin reflétait principalement une augmentation des primes d'été" aux effets temporaires, et "la croissance des salaires reste inférieure à l'inflation".
Mais de nouvelles subventions du gouvernement aux factures d'énergie devraient limiter l'inflation au cours des prochains mois, et "la croissance des salaires de base devrait accélérer encore dans le sillage des fortes augmentations" salariales décidées au printemps, a-t-il ajouté.
La consommation dans l'archipel est mise à mal depuis début 2022, à la fois par l'inflation et la faiblesse du yen qui était accentuée par la politique accommodante de la Banque du Japon (BoJ), fragilisant le pouvoir d'achat des ménages.
La Banque centrale a relevé son taux directeur fin juillet, tout en avertissant que la poursuite de ce resserrement monétaire serait conditionnée à la réalisation d'une inflation stable autour de 2%, inscrite dans un cercle vertueux entre augmentations salariales, hausse de la consommation et croissance économique.
Ce resserrement monétaire, conjugué à des craintes de récession aux Etats-Unis et au dénouement de mouvements spéculatifs sur le yen, a cependant contribué à plonger les marchés mondiaux dans l'effroi la semaine dernière, et pourrait inciter la BoJ à la prudence.
"La politique de la BoJ est probablement devenue plus réticente au risque, compte tenu de la récente nervosité des marchés face aux montagnes russes du yen et des actions", a souligné Robert Carnell dans une note d'ING.
- Changement de Premier ministre -
Selon lui, le changement de Premier ministre qui devrait intervenir au Japon le mois prochain, après l'annonce mercredi par Fumio Kishida qu'il ne briguerait pas un nouveau mandat, fait aussi peser une incertitude supplémentaire sur l'économie nippone.
"Compte tenu de sa faible cote de popularité, ce n'est pas une surprise totale. Cependant, il n'y a pas de candidat évident pour reprendre le rôle de Kishida, ce qui rend difficile l'estimation de l'orientation" de politique économique du prochain gouvernement, a estimé M. Carnell.
Les investissements résidentiels (+1,6%) et non-résidentiels (+0,9%) des entreprises ont également progressé au deuxième trimestre.
Et les exportations japonaises, dont la chute au premier trimestre était notamment liée à des scandales dans l'industrie automobile locale, obligeant Daihatsu, filiale du géant Toyota, à suspendre temporairement toute sa production au Japon, ont par ailleurs rebondi de 1,4% au deuxième trimestre.
Les importations du pays ont elles aussi progressé (+1,7%), résultant en une contribution légèrement négative du commerce extérieure au PIB.
Le secteur automobile n'est toutefois pas encore au bout du tunnel après de nouveaux déboires en juin et juillet qui ont touché plusieurs constructeurs, et Toyota aurait revu à la baisse ses prévisions de production annuelle, a rapporté la semaine dernière un journal économique local japonais.
J.P.Estrada--TFWP