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L'Ukraine a annoncé samedi matin le début de l'évacuation par les civils du port stratégique de Marioupol (sud), après un accord de cessez-le-feu temporaire avec les forces russes qui l'assiègent et avancent ailleurs dans le pays, avec de féroces combats autour de la capitale Kiev.
L'annonce concernant Marioupol, qui pourrait ouvrir la voie à une prochaine conquête de la ville par les Russes, intervient alors que de les deux parties se préparent à un troisième round de négociations durant le week-end.
Après dix jours de guerre, le bilan est impossible à vérifier de manière indépendante. Kiev fait état d'au moins 350 civils et plus de 9.000 soldats russes tués, sans mentionner ses pertes militaires, et Moscou évoque 2.870 morts côté ukrainien et 498 côté russe.
Plus de 1,2 million de réfugiés ont déjà fui l'Ukraine, selon le dernier décompte de l'ONU, suscitant une forte mobilisation notamment dans les pays frontaliers.
La prise de Marioupol, assiégée et bombardée par les Russes depuis près d'une semaine, et largement privée ces derniers jours d'électricité, de nourriture et d'eau notamment, serait un important tournant dans le conflit.
Elle permettrait en effet, à l'est, la jonction entre les forces russes venues de la Crimée annexée, qui ont déjà pris les ports clés de Berdiansk et Kherson, et les troupes séparatistes et russes dans le Donbass. En 2014, Marioupol, ville de quelque 450.000 habitants située sur la mer d'Azov, avait résisté aux assauts des forces prorusses venues de Donetsk notamment.
"L'évacuation de la population civile commencera à 11H00 (09H00 GMT)", a indiqué la mairie de Marioupol, peu après que Moscou eut annoncé avoir conclu avec Kiev un accord de cessez-le-feu temporaire pour l'évacuation des civils de la ville et de celle de Volnovakha, située à une centaine de km plus au nord.
A partir de 07H00 GMT, "la partie russe déclare un régime de silence (des armes) et l'ouverture de couloirs humanitaires pour l'évacuation des civils" des deux villes, a déclaré peu avant le ministère russe de la Défense, cité par les agences de presse russes, précisant que l'emplacement des couloirs humanitaires et des points de sortie ont été déterminés en accord avec Kiev.
- "Lâche et terroriste" -
Samedi matin, le ministre ukrainien de la Défense, Oleksiï Reznikov, a dans un message publié sur Facebook admis que les Russes avaient avancé dans plusieurs directions tout en précisant qu'ils ne contrôlent qu'une "petite portion" de territoire dans le pays, et que les combattants ukrainiens "les repoussent".
"La +grande+ armée a montré sa vrai nature, lâche et terroriste, capable d'attaquer la population - femmes, enfants, civils désarmés", mais "l'ennemi répondra de toute vie prise, de toute larme provoquée", a-t-il ajouté.
L’armée russe, qui continue de bombarder intensément les alentours de Kiev au nord-ouest et à l'est notamment, a de son côté indiqué qu'à l'est, les séparatistes prorusses ont pris le contrôle de six localités dans la région de Donetsk. Les forces russes disent aussi avoir progressé dans le sud, prenant dix villages et localités.
Entre Marioupol et Kiev (centre), l'armée russe occupe depuis vendredi la centrale nucléaire de Zaporojie (sud), où des frappes de son artillerie, selon les Ukrainiens, ont provoqué un incendie - dont Moscou nie être à l'origine.
Cette attaque contre la plus grande centrale nucléaire d'Europe, qui compte six réacteurs, a choqué la communauté internationale. Elle constitue "une immense menace pour toute l'Europe et le monde", a réagi vendredi au Conseil de sécurité de l'ONU l'ambassadrice américaine Linda Thomas-Greenfield.
Moscou a catégoriquement réfuté avoir attaqué le site, dénonçant un "mensonge" et accusant des "groupes de saboteurs ukrainiens, avec la participation de mercenaires".
Les pays du G7 ont annoncé qu'ils allaient "imposer de nouvelles sanctions sévères en réponse à l'agression russe".
S'il a insisté sur la nécessité de "mettre fin" à ce conflit, le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg a prévenu que l'Alliance atlantique ne pouvait répondre à la demande de création d'une zone d'exclusion aérienne, pour éviter de se laisser entraîner dans le conflit.
Cela reviendrait à "envoyer des avions de l'Otan dans l'espace aérien ukrainien" pour "abattre des avions russes" et "pourrait conduire à une guerre totale", a renchéri le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken.
- Nouveaux pourparlers -
Le président Volodymyr Zelensky a vivement réagi. L'Otan "a donné le feu vert à la poursuite des bombardements sur des villes et villages ukrainiens, en refusant d'instaurer une zone d'exclusion aérienne", a-t-il dénoncé dans une vidéo.
En attendant, une responsable du Pentagone a annoncé vendredi que "du matériel pour un montant de 240 millions de dollars, y compris certains des équipements les plus indispensables comme les équipements anti-blindés", avait été remis aux forces ukrainiennes "à plusieurs endroits".
Selon Mykhaïlo Podoliak, conseiller de la présidence ukrainienne, un troisième round de négociations russo-ukrainiennes pourrait se tenir samedi ou dimanche.
Mais les chances de parvenir à des progrès paraissent extrêmement minces, le président russe Vladimir Poutine ayant prévenu que le dialogue avec Kiev ne serait possible que si "toutes les exigences russes" étaient acceptées, notamment un statut "neutre et non-nucléaire" pour l'Ukraine et sa "démilitarisation obligatoire".
Les deux sessions précédentes de pourparlers, à la frontière ukraino-bélarusse puis à la frontière polono-bélarusse, n'ont pas abouti à un arrêt des combats, mais les parties se sont entendues pour mettre en place des "couloirs humanitaires" pour l'évacuation des civils.
- Répression à Moscou -
Vladimir Poutine a assuré que les forces russes ne bombardaient pas Kiev et les grandes villes ukrainiennes, qualifiant de "grossière fabrication de propagande" les informations sur les destructions menées par Moscou.
En Russie, le Kremlin a durci sa répression de toutes les voix dissidentes face au conflit.
Vladimir Poutine a signé vendredi une loi prévoyant jusqu'à 15 ans de prison pour toute personne publiant des "informations mensongères".
L'agence Bloomberg News et la BBC (radiotélévision publique britannique) ont annoncé suspendre temporairement l'activité de leurs journalistes, et la chaîne américaine d'informations CNN la diffusion de ses programmes en Russie.
Le Conseil de sécurité de l'ONU se réunira une nouvelle fois en urgence lundi sur la crise humanitaire, selon des diplomates, alors que le Programme alimentaire mondial (PAM) a averti que la nourriture manque dans les régions affectées par la guerre.
La liste des entreprises se désengageant de Russie s'est encore allongée samedi. Le sud-coréen Samsung Electronics a suspendu ses exportations vers la Russie, où il contrôle un tiers du marché des smartphones, après le géant américain de l'informatique Microsoft la veille.
emd-burs/at
L.Coleman--TFWP