AEX
-3.3700
Au banc des accusés sur la scène internationale: la Russie a défendu lundi l'invasion de l'Ukraine à l'Assemblée générale de l'ONU lors d'une "session extraordinaire d'urgence" de ses 193 membres qui ont multiplié de leur côté les appels à arrêter la guerre, jugée "insensée".
"Les combats en Ukraine doivent cesser", a martelé le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres. "Ils font rage dans tout le pays, dans les airs, à terre et en mer. (...) Trop c'est trop. Les soldats doivent retourner dans leurs casernes", a-t-il lancé.
Le chef de l'ONU a aussi exhorté les dirigeants impliqués à "aller vers la paix" alors que de premiers pourparlers entre Russie et Ukraine se sont conclus lundi. "Les armes parlent maintenant (...) mais "il n'est jamais trop tard pour s'engager dans des négociations de bonne foi et régler pacifiquement toutes les questions", a-t-il plaidé.
A la tribune, l'Ukraine et la Russie se sont une nouvelle fois opposées de manière virulente, alors que le Danemark dénonçait une entreprise russe "insensée".
Le monde "n'a rien à gagner" d'une nouvelle Guerre froide, a fait valoir la Chine, qui apparaît dans l'embarras face à la tournure des événements.
Prenant souvent à témoin l'assistance, l'ambassadeur ukrainien à l'ONU, Sergiy Kyslytsya, a mis en garde avec émotion contre une destruction de son pays. "Si l'Ukraine ne survit pas, l'ONU ne survivra pas", a-t-il lancé.
"Ne vous faites pas d'illusions. Maintenant, nous pouvons sauver l'Ukraine, sauver les Nations unies, sauver la démocratie et défendre les valeurs auxquelles nous croyons", a ajouté le diplomate.
- Résolutions attendues -
Réaffirmant que la Russie agissait militairement en "légitime défense", comme le prévoit la Charte des Nations unies, son homologue russe, Vassily Nebenzia, ferme dans son expression, s'est longuement étendu sur le Donbass séparatiste dans l'est de l'Ukraine. Il a parlé de "souffrance" de la population locale, de "provocations" et de "fables" ukrainiennes, de "clichés anti-russes" de l'Occident.
"La Russie continue de devoir faire face à un afflux de réfugiés" en provenance de l'est de l'Ukraine, a assuré le diplomate russe alors que l'ONU n'a pas à ce jour évoqué une crise à ce sujet.
Depuis le début du conflit, les Occidentaux et l'ONU accusent la Russie de violer l'article 2 de la Charte des Nations unies intimant à ses membres de s'abstenir de toute menace et de tout recours à la force pour régler une crise.
La Russie est aussi sur la sellette à l'ONU à Genève, où un débat urgent au Conseil des droits de l'homme de l'ONU doit être organisé cette semaine.
La réunion de l'Assemblée générale à New York avait débuté par une minute de silence.
Une mise au vote d'une résolution - a priori mercredi - est attendue à la fin des interventions dont le nombre dépasse la centaine et qui devraient se prolonger mardi.
Plus de 70 pays ont très rapidement apporté leur parrainage lundi au projet de texte piloté par les Européens en coordination avec Kiev, selon des diplomates. Il a été révisé dans le sens de la modération par rapport au texte initial, afin d'engranger un maximum de voix.
La résolution ne condamne plus "dans les termes les plus forts l'agression de la Russie contre l'Ukraine", se bornant à la "déplorer", selon les deux textes obtenus par l'AFP.
- "Protéger les civils" -
Similaire à un texte américano-albanais co-parrainé par plus de 80 nations issues de tous les continents et rejeté vendredi au Conseil de sécurité à la suite d'un veto de la Russie, la dernière version réclame le retrait immédiat des troupes russes d'Ukraine et l'arrêt des combats. A l'Assemblée générale, il n'y a pas de droit de veto.
Au Conseil de sécurité, l'Afrique et l'Amérique latine avaient fait corps avec les Etats-Unis et l'Europe pour dénoncer l'invasion russe tandis qu'à l'Assemblée générale, les habituels soutiens de Moscou - Syrie, Cuba, Chine, Inde... - devraient appuyer sa politique ou s'abstenir.
Outre un positionnement à l'égard de l'Ukraine, la session extraordinaire de l'Assemblée générale de l'ONU - une dizaine organisée seulement depuis 1950 - sera un baromètre de l'évolution du monde, avec le constat au cours de la dernière décennie d'un recul de la démocratie au profit de régimes autocratiques (Soudan, Birmanie, Mali, Burkina Faso...), selon des diplomates.
Dans l'immédiat, à défaut d'avoir la capacité de mettre un terme aux hostilités, l'ONU va devoir se concentrer sur la crise humanitaire déclenchée par l'invasion russe. Les Etats-Unis et l'Union européenne ont prévu que le conflit, s'il se poursuivait, pourrait faire entre 5 et 7 millions de réfugiés.
La France a convoqué lundi à 15H00 (20H00 GMT) une réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'ONU et entend lui faire adopter a priori mardi une résolution appelant à l'"arrêt des hostilités", à "protéger les civils" et à "permettre un acheminement de l'aide humanitaire sans entrave". Ce texte a été co-écrit avec le Mexique.
La position de la Russie sur ce projet de résolution, après son premier veto vendredi, reste inconnue.
A.Nunez--TFWP