AEX
-3.3700
Reconnaissance de la Crimée comme étant un territoire russe, démilitarisation et "dénazification" de l'Ukraine : Vladimir Poutine a posé ses conditions lundi à l'arrêt de l'invasion russe en Ukraine, tandis qu'avaient lieu de premiers pourparlers russo-ukrainiens et que d'intenses combats se déroulaient à Kharkiv, la deuxième ville du pays.
Peu après, les délégations russe et ukrainienne, qui négociaient depuis 11h00 GMT à la frontière ukraino-bélarusse pour la première fois depuis le début de l'attaque russe jeudi, se séparaient pour consultations.
On ignorait si cette interruption était liée aux déclarations du président russe. Mais les deux parties ont convenu de se retrouver "bientôt" pour un deuxième round.
Vladimir Poutine a adressé ces exigences au cours d'un échange avec son homologue français Emmanuel Macron, le président en exercice de l'Union européenne.
Un règlement du conflit "n'est possible que si les intérêts sécuritaires légitimes de la Russie sont pris en compte sans conditions", a répété le Kremlin après leur conversation, ajoutant espérer que les négociations "mèneraient aux résultats espérés".
Emmanuel Macron n'a pas dans l'immédiat commenté ces exigences. L'Elysée a simplement fait savoir que le président français avait demandé à M. Poutine l'arrêt des frappes contre les civils et la sécurisation des axes routiers en Ukraine. Et assuré que ce dernier avait "confirmé sa volonté de s'engager".
- Bataille pour Kharkiv -
Car, sur le terrain, les négociations n'ont pas entraîné de répit dans les combats, bien que la présidence ukrainienne eut annoncé, avant leur ouverture, qu'elle réclamerait "un cessez-le-feu immédiat et le retrait des troupes (russes) du territoire ukrainien".
Au moins onze personnes ont été tuées dans des bombardements russes sur des quartiers d'habitation, selon le gouverneur régional, qui a dit craindre qu'il n'y ait eu des "dizaines de morts".
Un photographe de l'AFP a vu les corps sans vie de deux soldats russes devant une école en ruines, non loin du centre de cette ville de 1,4 million d'habitants.
Dans la capitale Kiev, la situation semblait plus calme lundi, après un week-end sous couvre-feu. Mais beaucoup se préparaient à un nouvel assaut russe.
La ville était hérissée de barricades de fortune et des panneaux électroniques publics prévenaient les Russes qu'ils seraient accueillis "par des balles".
En l'absence jusqu'ici de victoire majeure de l'armée russe, Vladimir Poutine avait franchi dimanche un nouveau cap dans la menace d'élargir le conflit, dont beaucoup redoutent qu'il ne devienne le plus grave en Europe depuis 1945.
Alors que la Russie dispose du plus grand nombre d'ogives nucléaires dans le monde, il avait déclaré avoir mis ses forces nucléaires en "état spécial d'alerte" face aux "déclarations belliqueuses de l'Otan" et aux sanctions "illégitimes" imposées à la Russie.
- Mesures pour soutenir le rouble -
Lundi, le maître du Kremlin a aussi ordonné des mesures-choc pour soutenir le rouble, qui touchait des planchers historiques face au dollar et à l'euro après l'annonce de nouvelles sanctions économiques européennes et américaines.
De nombreux Russes commençaient à retirer leur épargne bancaire et les résidents en Russie ne pourront plus, à compter de mardi, transférer des devises à l'étranger. Les exportateurs russes devront quant à eux convertir en roubles 80% de leurs revenus engrangés en devises étrangères depuis le 1er janvier.
Auparavant, la Banque centrale russe avait annoncé relever de 10,5 points, à 20%, son taux directeur.
Une riposte aux nouvelles sanctions annoncées par les Européens pendant le week-end, avec l'exclusion de plusieurs banques russes du système interbancaire international Swift et l'interdiction de toute transaction avec la Banque centrale de Russie. Des mesures que même la Suisse, malgré son attachement à la neutralité et ses banques très prisées des oligarques russes, a annoncé reprendre dans leur "intégralité".
Les Etats-Unis ont annoncé une sanction similaire lundi, de sorte que la Banque centrale devrait voir tous ses actifs gelés dans l'UE et aux Etats-Unis.
La Russie a aussi fermé lundi ses portes aux compagnies aériennes de 36 pays, dont beaucoup d'européennes, après que les Européens eurent fermé leur espace aérien aux compagnies russes.
L'ensemble des marchés mondiaux ont replongé lundi, craignant que le conflit n'alimente la flambée des prix de l'énergie et la reprise de l'inflation.
Si les pays européens sont pour la plupart membres de l'Alliance atlantique -qui a annoncé qu'elle n'enverrait pas de troupes en Ukraine-, ils ont aussi annoncé dimanche des mesures inédites de soutien militaire à Kiev : déblocage de 450 millions d'euros pour financer des livraisons d'armes et envoi d'avions de combat.
Après de nombreuses manifestations contre l'invasion russe dans le monde ce week-end, un nouveau rassemblement s'est déroulé lundi en Allemagne : quelque 250.000 personnes ont défilé à Cologne, transformant la parade du traditionnel Carnaval en mobilisation contre la guerre.
Dans ce contexte, le président américain Joe Biden devaient à nouveau s'entretenir avec ses alliés à partir de 16H15 GMT, pour coordonner leur réponse à l'attaque russe.
Emmanuel Macron participera à cette visioconférence, avant de dîner avec le chancelier allemand Olaf Scholz et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen.
- 500.000 réfugiés -
Le conflit a jeté sur les routes des flots de réfugiés toujours plus nombreux.
Depuis le début de l'invasion jeudi, plus de 500.000 Ukrainiens ont fui vers les pays voisins, a déclaré lundi le Haut-Commissaire de l'ONU pour les réfugiés. L'UE a dit s'attendre à plus de sept millions de personnes déplacées.
La majeure partie se rend en Pologne. Mais Roumanie, Slovaquie et Hongrie -toutes membres de l'Otan- sont aussi concernées.
Malgré ses positions contre les migrants, le Premier ministre hongrois Viktor Orban a assoupli les règles d'asile et les Hongrois ont accouru à la frontière ukrainienne pour proposer bols de goulash, offres d'hébergement et réconfort.
De longues files de voiture patientent aux points de passage frontaliers avec la Pologne.
Depuis la Russie, les départs d'Occidentaux devraient aussi s'accélérer. Les Etats-Unis ont recommandé lundi à leurs ressortissants de quitter immédiatement le pays, après l'Italie et la Belgique.
Le bilan de cinq jours de conflit reste incertain.
L'ONU a indiqué lundi avoir enregistré 102 civils tués et 304 blessés, mais averti que les chiffres réels étaient "considérablement" plus élevés.
L'Ukraine a fait état lundi de 352 civils tués et 2.040 blessés depuis jeudi. Elle affirme que plusieurs milliers de soldats russes ont péri.
Les Russes, quant à eux, n'ont donné aucun chiffre.
Les 193 membres de l'Assemblée générale des Nations unies ont eu à New York une rare "session extraordinaire d'urgence" consacrée au conflit. Les appels à arrêter la guerre s'y sont multipliés, tandis qu'Ukraine et Russie s'opposaient avec virulence à la tribune.
"Les combats en Ukraine doivent cesser", a martelé le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres. "Trop, c'est trop. Les soldats doivent retourner dans leurs casernes", a-t-il ajouté.
La France devait soumettre une résolution sur l'aide humanitaire à l'Ukraine au Conseil de sécurité. La Russie y détient un droit de veto qui exclut toute condamnation officielle de l'offensive.
burx-cat/gkg/bd
L.Davila--TFWP