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Dans le village de Nouâtre (Indre-et-Loire), le niveau de la Vienne est passé de moins de trois mètres samedi à près de neuf dimanche. Alors "pour le moment on est dans l'action" pour sauver ce qui peut l'être, témoigne Sandrine Touchard.
Depuis samedi, tous les villageois ont reçu des messages "Alerte d'urgence: critique" sur leurs téléphones portables. Les autorités les ont appelés à "la plus grande vigilance" et à "respecter les consignes", entre autres.
Des messages qui ont permis à chacun de s'organiser à l'instar de Sandrine Touchard, 43 ans, gérante de la maison d'hôtes du village "La clé des jardins", qui "dès (samedi) matin, a commencé à tout remonter de (ses) caves parce qu’ils annonçaient une crue à 7m80".
"On avait tout remonté sauf qu’on est largement à plus de 7m80 aujourd’hui", se désole-t-elle.
La Vienne a même atteint 8,96 m en début d'après-midi, du jamais vu depuis janvier 1982 et ses 8,62 m selon Vigicrues.
Dimanche, la quadragénaire s'affaire avec son conjoint et des voisins à pomper l'eau qui a rempli son séjour et sa cuisine, tandis qu'on aperçoit "Le Réveillon", petit cours d'eau de 30 centimètres de profondeur habituellement, déferler devant ses fenêtres.
Si "l'eau atteint le seuil de la fenêtre, on va perdre beaucoup", redoute-t-elle. "Pour le moment on est dans l’action... après je pourrai m’effondrer", dit-elle les yeux embués et la voix chevrotante. "C’est ma maison, c’est mon gagne-pain."
Non loin, le maire et les pompiers tentent de convaincre les derniers riverains, calfeutrés chez eux, de quitter leur domicile.
"La situation, on ne la maîtrise pas", confesse le maire de la commune, Laurent Augras, qui observe la Vienne "continuer de monter" et craint "qu'on gagne encore un mètre ou plus".
- Evacuée en "bateau gonflable" -
Dans cette petite commune de quelque 900 habitants, l’eau est montée dans les jardins et les maisons près de l’église et des commerces.
Christine Rabusseau, 64 ans, est venue avec son époux de la ville voisine de Saint-Maure-de-Touraine pour aider sa mère de 87 ans.
"Ce matin, on a pris un bateau gonflable et on a mis maman dedans pour l’évacuer", raconte-t-elle, photos à l'appui.
Lorsqu'ils sont arrivés samedi soir, "il y avait des poissons partout qui sautaient du cours d’eau", s'amuse-t-elle. "D’habitude on cache les œufs de Pâques dans le jardin de maman, et le voisin nous a dit : +Cette année, c’est pas les chocolats qu’il faut chercher, mais les poissons qu’il faut pêcher+", rapporte Christine.
Qu'importe si la maison est dans l'eau. La famille, qui vit là sa quatrième crue depuis 1962, a décidé de maintenir ses festivités: "On a réservé une petite salle avec toute la famille – on est 35 - pour fêter Pâques et les 18 ans d’un des petits-enfants", dit Christine.
Pour le reste, le couple a "coupé l’électricité ce matin, et maintenant on attend que l’eau s’en aille pour nettoyer et mesurer les dégâts".
Pour l'épicière du village, Claire Nadreau, 58 ans, c'est une autre paire de manches. Après avoir mis à l'abri ses deux chiens, la commerçante est venue demander de l'aide dans le café pour remonter sa marchandise de la réserve.
"L’eau commence à rentrer, ça y est (...) On a surélevé encore d’un étage tout ce qui était alimentation, tous les produits", précise Claire, les pieds dans l'eau. "On verra bien, de toute façon on n’a pas le choix."
En dépit de la montée des eaux qu'elle constate à vue d'oeil, impuissante, elle se veut pour l'heure "positive". "C’est demain que ce sera plus difficile."
Et pour relativiser, la quinquagénaire se rappelle la situation vécue dans le Nord, théâtre de violentes inondations à plusieurs reprises ces derniers mois: "Il y a des gens pour qui c’est pire que nous, et des crues qui sont terribles. Nous ça n’a pas été rapide, ça monte vite mais c'est pas violent".
M.McCoy--TFWP