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Pas un avion de ligne ou de chasse, missile ou fusée français ne vole avant d'être passé pour des essais dans les souffleries de l'Onera à Modane (sud-est de la France), indispensables pour valider l'aérodynamique de tout engin volant.
Le site de l'Office national d'études et de recherches aérospatiale (Onera) s'est niché dans le creux de la vallée de la Maurienne pour profiter du dénivelé et de l'énergie hydraulique afin de faire fonctionner S1MA, la plus grande soufflerie sonique du monde, capable de reproduire un vol à une vitesse proche de Mach 1 (1.200 km/h).
Dans cette "cathédrale des vents", la maquette de l'avion ou du moteur bardée de capteurs est placée au centre d'un boyau long de 400 mètres et d'un diamètre allant jusqu'à 24 mètres. Un ventilateur de 15 mètres de diamètre brasse jusqu'à 10 tonnes d'air par seconde pour générer le flux d'air.
Pour l'alimenter, l'énergie nécessaire est considérable et provient de deux lacs situées 800 mètres plus haut: une conduite d'eau dévale la montagne et alimente deux turbines hydrauliques au rythme de 15 m3 par seconde.
"On atteint une puissance de 88 mégawatts (MW)", soit le dixième de celle d'un réacteur nucléaire, explique Pascal Crozier, directeur des souffleries de Modane.
Une deuxième soufflerie, S2MA, permet d'atteindre des vitesses supersoniques allant jusqu'à Mach 3. Des maquettes de Rafale ou de missiles y sont notamment testés.
Deux autres souffleries, S3MA et S4A, fonctionnent elles au moyen de rafales d'air comprimé. La première permet d'atteindre Mach 6 (7.400 km/h), dépassant donc le seuil hypersonique.
La seconde va elle au-delà de Mach 10 (12.350 km/h), vitesse à laquelle évoluent les planeurs hypersoniques comme le V-MAX français, ces armes en développement aux Etats-Unis comme en Chine.
Cette installation stratégique tant pour la dissuasion nucléaire que pour la décarbonation de l'aviation est à l'origine un butin de guerre (pièces et plans) récupéré par les Français dans le Tyrol autrichien en 1945.
Et si un affaissement du sol et de certaines parties des bâtiments a menacé le site septuagénaire, un investissement de 20 millions d'euros en 2016, quatre ans de travaux et 4.000 m3 de béton injectés jusqu'à 50 mètres de profondeur ont permis d'assurer sa pérennité et de faire face à la charge de travail.
Entre projets civils et militaires, "on a de l'activité pour au moins quatre ou cinq ans", selon Pascal Crozier, qui doit pourvoir 22 postes pour prêter main forte aux 150 employés des souffleries.
L'Office a battu en 2022 son propre record de commandes, qui s'est élevé à 162,9 millions d'euros (+7% par rapport à 2021) dont 59 pour la seule Direction générale de l'armement (DGA) et 15,6 pour la Direction générale de l'Aviation civile (DGAC). Environ un tiers des clients viennent de l'étranger, majoritairement d'Europe mais aussi de Corée du Sud.
W.Knight--TFWP