AEX
4.0100
Dans l'usine Stellantis de Hordain (Nord), les camionnettes Peugeot, Fiat ou Toyota disent lentement adieu au diesel en passant à l'électrique et bientôt à l'hydrogène.
En visite jeudi sur le site, près de Valenciennes, le patron du groupe Carlos Tavares a annoncé un coup d'accélérateur sur cette dernière technologie, encore balbutiante et souffrant de plusieurs défauts.
Le groupe va lancer en 2023 la construction en série d'utilitaires équipés d'une pile à combustible, un système à hydrogène qui alimente une batterie et un moteur électrique.
En 2024, trente ans après l'inauguration du site, Hordain devrait disposer d’une capacité de 5.000 utilitaires par an équipés d’une pile à combustible, soit 3% de sa production annuelle.
Vendus sous les marques Peugeot, Citroën et Opel, ils seront destinés aux marchés allemand et français, où l'hydrogène bénéficie de très larges subventions.
Pour le moment, les 2.400 salariés de Hordain et des milliers de robots pressent, soudent du métal, peignent les carrosseries, assemblent calandres et tableau de bord, au rythme de 628 véhicules par jour, 24 heures sur 24.
Sur une ligne de montage unique sont assemblés les six véhicules frères, produits sur le même châssis, en version utilitaire comme en version passagers, avec des sièges: les Toyota Pro-Ace, Opel et Vauxhall Vivaro, Peugeot Expert, Fiat Scudo et Citroën Jumpy.
L'atelier très compact est traversé par des centaines d'AGV, des robots-tortues orange: ils ont remplacé la plupart des caristes pour amener les pièces détachées à chaque poste.
"Le site a fait d’énormes progrès en qualité au cours des trois dernières années", s'est félicité M. Tavares. Il sera "dès la fin de cette année le plus performant au monde pour les véhicules utilitaires", même s'il doit encore baisser ses coûts, selon le patron portugais.
- Electrique et hydrogène -
Hordain a pris le virage électrique depuis 2020: 43% des modèles reçoivent désormais une grosse batterie dans leurs entrailles, explique Christophe Schaubreock, responsable de l'atelier.
L'électrique ne représentait pourtant que 3% des ventes européennes d'utilitaires en 2021, contre 90% de diesel, selon les chiffres des constructeurs.
Stellantis défend sa position de leader européen sur ce marché très juteux (livreurs, artisans...), alors que de petits concurrents comme Arrival se positionnent sur le marché des camionnettes électriques.
L'usine de Hordain a d'ailleurs a été plutôt protégée des pénuries de semi-conducteurs par rapport à d'autres sites du groupe, même si la production a fini par s'y arrêter une semaine mi-octobre, faute de pièces.
Outre-Manche, l'usine Stellantis de Luton continue de fabriquer de nombreuses versions diesel, pendant que Hordain représente la polyvalence et l'adaptation du groupe à la transition énergétique.
La prochaine étape est l'hydrogène. Avec un investissement de 10 millions d’euros, l’usine nordiste ajoutera à certains des véhicules en bout de ligne le réservoir, les batteries additionnelles et la pile à combustible.
Quelques dizaines de véhicules à hydrogène avaient déjà été assemblés dans l’usine de Rüsselsheim (Allemagne).
Plus adaptés aux trajets extra-urbains que les électriques, ces utilitaires promettent une autonomie de 400 kilomètres pour une recharge en quelques minutes. Et ils ne relâchent que de la vapeur d'eau à l'échappement.
Leur construction en série devrait faire baisser leur prix qui s'élève pour l'instant à 110.000 euros l’unité (hors bonus). Mais il manque encore un réseau de distribution, ainsi que de l'hydrogène "vert" et pas cher: l'extraction de ce gaz, très énergivore, est encore très peu basée sur des énergies renouvelables.
Selon M. Tavares, la diffusion des véhicules à hydrogène "passera plutôt par les flottes des grandes entreprises qui pourront investir" et installer des distributeurs dans leurs locaux où les chauffeurs viendront recharger les véhicules après leur journée. Stellantis a passé un partenariat avec Engie pour proposer une offre tout-en-un, avec véhicule, borne et hydrogène.
L'offre à hydrogène devrait être étendue progressivement aux gros utilitaires, comme le Fiat Ducato et aux pickups comme le Dodge Ram, dans les usines du groupe en Italie, en Pologne ou aux Etats-Unis, a indiqué M. Tavares.
A.Williams--TFWP