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Les agriculteurs votent à partir de mercredi pour leurs représentants aux chambres d'agriculture, un scrutin à l'écho inédit qui déterminera le nouveau rapport de force entre des syndicats qui ont tous gagné en visibilité depuis la crise de l'hiver dernier.
Quelque deux millions d'électeurs - exploitants actifs ou retraités, mais aussi salariés et propriétaires fonciers - sont invités à s'exprimer du 15 au 31 janvier, sauf à Mayotte où le vote a été reporté après le cyclone Chido. Les résultats seront publiés au plus tard le 8 février.
Lors du précédent scrutin, en 2019, moins d'un agriculteur sur deux avait participé.
Les chambres d'agriculture ont pour rôle d'"améliorer la performance économique, sociale et environnementale" des exploitations, selon le Code rural.
Acteurs clé du monde agricole, ces établissements publics conseillent et offrent des prestations diverses aux exploitants (pour l'installation, la gestion de leur exploitation, la conformité avec la PAC, etc.), tout en représentant les intérêts agricoles auprès des pouvoirs publics.
Tout l'enjeu du scrutin sera de voir si l'hégémonie de l'alliance FNSEA-Jeunes agriculteurs (JA), aujourd'hui à la tête de 97 chambres sur 101, mais contestée sur le terrain par la Coordination rurale (CR) et la Confédération paysanne, est ébranlée.
Face au duo historique, la CR (deuxième syndicat avec trois chambres) espère en ravir entre 15 et 20, et la Confédération paysanne (qui dirige aujourd'hui celle de Mayotte), une dizaine.
Revendiquant une hausse importante des adhésions, les deux challengers dénoncent une forme de co-gestion installée entre le gouvernement et la FNSEA, l'ex-syndicat unique créé après-Guerre.
Ils déplorent d'ailleurs un mode de scrutin favorable à l'alliance FNSEA-JA car attribuant à la liste arrivée en tête la moitié des sièges, le reste étant ensuite réparti à la proportionnelle.
La Confédération paysanne, qui réclame plus de proportionnelle, s'est vu opposer lundi une fin de non-recevoir par François Bayrou, auprès duquel elle espérait pourtant trouver une oreille attentive au vu de son attachement à ce mode de scrutin au niveau politique.
- "Tour de France" -
Le Premier ministre a reçu lundi tour à tour les quatre principaux syndicats. Le Modef, le plus petit, doit être reçu vendredi.
Le monde agricole, confronté à une crise existentielle renforcée en 2024 par de graves aléas climatiques et sanitaires, s'était fortement mobilisé l'hiver dernier, obtenant de nombreuses promesses fiscales, financières ou sur les normes, de la part du gouvernement Attal.
Mais leur mise en oeuvre a été en grande partie suspendue en raison de l'instabilité politique, et les syndicats ont relancé leurs actions à l'automne, bien qu'en ordre dispersé.
François Bayrou, qui avait déjà promis de tenir les engagements pris par ses prédécesseurs en 2024, a mené mardi dans son discours de politique générale une charge contre les contrôles et les normes environnementales auxquels les agriculteurs sont soumis.
FNSEA et JA ont donné au gouvernement jusqu'au salon de l'Agriculture, organisé à partir du 22 février, pour concrétiser les engagements budgétaires et législatifs.
Mais d'ores et déjà le président de la FNSEA Arnaud Rousseau s'est réjoui, après la déclaration du Premier ministre, que celui-ci partage ses "combats" notamment "sur les normes, le Mercosur mais aussi sur la gestion de l'eau" ainsi que de sa position sur "l'excès" de contrôles et la défense des agriculteurs accusés "injustement de nuire à la nature".
La CR, qui dénonce de façon virulente normes et contrôles - allant jusqu'à exiger la suppression de l'Office français de la biodiversité -, a indiqué lors d'une conférence mercredi, qu'elle se concentrait dans l'immédiat sur la campagne pour les chambres d'agriculture.
"Je poursuis mon tour de France pour aller à la rencontre de tous les agriculteurs jusqu’à fin janvier", a dit sa présidente Véronique Le Floc'h, prônant l'allègement des charges et des normes, et la défense des "fermes familiales".
La Confédération paysanne, qui défend notamment l'agroécologie, a dénoncé mardi une réponse gouvernementale "aux demandes populistes de la FNSEA et de la Coordination rurale", mais sans "mesures concrètes pour garantir" le revenu des agriculteurs.
C.M.Harper--TFWP