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Pas de blocage d'autoroute mais des "feux de la colère": l'alliance syndicale majoritaire FNSEA-JA donne lundi le coup d'envoi d'un nouveau cycle de la mobilisation agricole, avec des actions symboliques.
Moins d'un an après un ample mouvement de colère dans les campagnes, qui avait abouti en janvier à des blocages de sections d'autoroutes dans le pays, les syndicats agricoles appellent à nouveau leurs troupes à manifester mais en ordre dispersé, à l'approche de leurs élections professionnelles qui se tiennent en janvier.
Percutés par les mauvaises récoltes et les maladies animales émergentes, ils estiment n'avoir toujours pas récolté les fruits de la colère de l'hiver dernier: la concrétisation des 70 engagements alors pris par le gouvernement Attal a été ralentie par la dissolution de l'Assemblée nationale.
Et ils jugent les normes toujours aussi complexes et les revenus insuffisants.
Si les taxes sur le carburant agricole (GNR) avaient été un des ferments de la mobilisation l'an dernier, c'est l'aboutissement du projet d'accord de libre-échange de l'Union européenne avec les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay) qui pourrait mettre le feu aux poudres cette année.
En dépit de l'opposition de la classe politique comme des acteurs agricoles français, la Commission européenne, poussée par plusieurs pays comme l'Allemagne et l'Espagne, semble déterminée à signer d'ici à la fin de l'année cet accord qui permettra notamment aux pays latino-américains d'écouler plus de bœuf, poulet ou sucre sans droits de douane en Europe.
"Nous allons continuer de nous opposer" à l'accord, a assuré dimanche Emmanuel Macron, en déplacement en Argentine avant le G20, cherchant à "rassurer les agriculteurs".
- "Révolte agricole"? -
Sur le terrain, la mobilisation, qui pourra "durer jusque mi-décembre", se traduira par des rassemblements devant les préfectures et sur des places ou ronds-points baptisés "de l'Europe".
Ainsi, des adhérents de la FNSEA et des JA prévoient d'occuper symboliquement le "pont de l'Europe" qui relie Strasbourg à la commune allemande de Kehl.
"En volaille, c'est plus de 180.000 tonnes qui viendront inonder le segment de marché du blanc de poulet. En maïs, 70 molécules interdites en France sont autorisées au Brésil et pourtant les vraquiers déverseront la marchandise dans les ports européens!", s'indignent ces adhérents du Bas-Rhin dans un communiqué.
Ces actions sont avant tout symboliques, à l'instar du déversement de déchets vendredi devant le centre des impôts de Tarascon (Bouches-du-Rhône) rebaptisé "ambassade du Brésil", ou d'un convoi funéraire prévu lundi dans le Gers.
Lundi soir, des "feux de la colère" seront allumés simultanément dans les départements et, localement, des exploitants continuent de bâcher des panneaux de communes ou les rebaptiser du nom de villes sud-américaines du Mercosur, comme dans la Somme ou le Cantal.
Si quelques opérations-escargot pourraient perturber le trafic automobile, l'objectif de la mobilisation n'est pas de "bloquer" ou "d'ennuyer" les Français mais de faire passer le message selon lequel l'agriculture vit aujourd'hui "une situation d'urgence, dramatique dans certains endroits", a souligné dimanche le président de la FNSEA Arnaud Rousseau sur BFMTV.
"Si d'autres ont d'autres modes d'action, veulent utiliser la violence ou, comme je l'ai entendu, veulent (...) affamer Toulouse, ça n'est pas notre mode d'action", a-t-il souligné, en référence aux appels de certains responsables de la Coordination rurale (2e syndicat agricole) qui ont proposé ces derniers jours d'"encercler" ou d'"affamer" certaines métropoles.
La Coordination rurale a choisi d'attendre la tenue de son congrès (mardi et mercredi) pour amplifier sa mobilisation. Le syndicat promet "une révolte agricole" avec un "blocage du fret alimentaire" dès mercredi dans le sud-ouest si "aucune avancée" n'est constatée sur le dossier du Mercosur.
Opposée depuis 25 ans aux traités de libre-échange, la Confédération paysanne, 3e force syndicale, a participé à des rassemblements anti-Mercosur à Bruxelles ou en Aveyron, manifestant symboliquement devant le restaurant McDonald's de Millau que ses militants avaient démonté en 1999.
Cette semaine, la Confédération prévoit d'autres actions paficiques pour défendre le revenu des paysans, l'accès au foncier mais aussi réclamer un soutien à la transition agro-écologique, contre la logique des syndicats majoritaires qui réclament moins de contraintes environnementales et plus de stockage d'eau.
P.Navarro--TFWP