AEX
-11.7200
Le président israélien, Isaac Herzog, est arrivé mercredi en Turquie où il va effectuer la première visite d'un chef d'Etat israélien depuis 2007, avec pour ambition de "relancer" des relations bilatérales qui s'étaient tendues ces dix dernières années.
M. Herzog, dont le poste est largement honorifique, doit rencontrer à Ankara son homologue Recep Tayyip Erdogan qui s'est fait ces dernières années l'ardent défenseur de la cause palestinienne, compliquant les relations avec l'Etat hébreu.
La visite, préparée depuis des semaines, intervient alors que les deux pays ont lancé séparément une médiation entre la Russie et l'Ukraine et le conflit pourrait s'immiscer dans leur entretien.
Les ministres des Affaires étrangères russe et ukrainien se retrouvent jeudi à Antalya (sud) pour la première fois depuis le début de l'offensive de Moscou contre l'Ukraine, le 24 février.
Mais les questions bilatérales vont probablement dominer la rencontre, après plus de dix ans de froid diplomatique.
Les relations sont tendues depuis l'affaire du Mavi Marmara en 2010, lorsque des forces israéliennes ont lancé un assaut meurtrier sur un navire turc tentant d'acheminer de l'aide à la bande de Gaza, enclave palestinienne sous blocus israélien.
Les deux pays avaient ensuite rappelé leurs ambassadeurs en 2018 après la mort de manifestants palestiniens à Gaza.
Recep Tayyip Erdogan a récemment dit s'attendre à ce que la visite de M. Herzog, avec lequel il s'est entretenu à plusieurs reprises depuis l'investiture de l'Israélien en juillet, "ouvre un nouveau chapitre" dans leurs rapports.
"Il est possible que des ambassadeurs soient renommés (à Ankara et Tel Aviv) à l'issue de cette rencontre", a estimé Sinan Ulgen, directeur du centre d'Etudes Edam à Istanbul.
A la mi-novembre, M. Erdogan avait échangé avec son homologue israélien et le Premier ministre Naftali Bennett - le premier entretien entre un Premier ministre israélien et M. Erdogan depuis 2013 -, quelques heures après la libération et le retour dans leur pays d'un couple de touristes israéliens accusés d'espionnage et détenus en Turquie.
Cet incident s'est avéré être "un tournant" car il a permis de "générer un dialogue entre les parties israélienne et turque et a créé une opportunité pour de meilleures relations", note Gallia Lindenstrauss, analyste israélienne à l'Institut des études stratégiques à Tel Aviv.
- "Modération" -
Selon des responsables israéliens, MM. Herzog et Erdogan pourraient aussi discuter de la possibilité d'exporter du gaz israélien vers l'Europe via la Turquie, une question au centre de l'actualité alors que les Européens cherchent à réduire leur dépendance au gaz russe.
Israël avait conclu en 2020 un accord avec Chypre et la Grèce portant sur la construction d'un gazoduc devant acheminer du gaz vers l'Europe, un projet qui avait suscité l'opposition de la Turquie.
Israël, Chypre et la Grèce, trois alliés en Méditerranée orientale, ont entretenu des relations difficiles avec Ankara.
Mais le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis est attendu dimanche à Istanbul.
Les trois pays participent également au Forum du gaz de la Méditerranée orientale avec d'autres pays de la région, mais qui exclut la Turquie.
En janvier, le président turc s'était dit prêt à coopérer avec Israël sur le projet de gazoduc, marquant la volonté d'Ankara de renouer les liens.
La frustration découlant de son exclusion des discussions sur le gaz, ainsi qu'une crise économique domestique et des rapports qui se sont récemment distendus avec Washington, poussent la Turquie à vouloir reprendre contact avec Israël, décrypte Mme Lindenstrauss.
Le président israélien s'est rendu fin février à Athènes pour une visite destinée à rassurer son allié grec avant le déplacement en Turquie.
Pour Gallia Lindenstrauss, le réchauffement des relations entre Israël et la Turquie pourrait "se révéler être une bonne nouvelle pour la Grèce et Chypre aussi, s'il se traduit par plus de modération dans la politique étrangère turque".
Isaac Herzog doit également rencontrer jeudi des membres de la communauté juive à Istanbul. Mais la neige qui s'invite fait planer une menace sur cette partie du voyage.
W.Matthews--TFWP