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Les députés se sont opposés une première fois mercredi en commission à l'interdiction de la corrida, une proposition de loi du LFI Aymeric Caron qui a peu de chances d'aboutir, mais suscite des débats enflammés et des manifestations le week-end prochain.
Ce rejet n'empêche pas l'examen du texte le 24 novembre dans l'hémicycle, si les délais impartis le permettent, car l'ordre du jour de cette journée dédiée aux propositions des Insoumis s'annonce chargé.
En commission des Lois, une majorité de députés a soutenu des amendements RN et LR pour supprimer le seul article de cette proposition de loi. Aymeric Caron a aussitôt dénoncé la "grosse pression des lobbies", sous les protestations.
Parfois électrique, la discussion a opposé défenseurs d'une "tradition culturelle régionale" aux militants de la cause animale. Et les débats ont souvent tourné autour de la personnalité d'Aymeric Caron et ses engagements "antispécistes".
D'emblée, l'ancien journaliste a fustigé la "barbarie" de la corrida, une "cérémonie hypocrite où l'animal prétendument honoré est massacré avec une précision et un raffinement qui confinent au sadisme".
Le député de Paris a reproché aux élus pro-corrida des "manoeuvres électoralistes" pour "ne pas froisser certains électeurs de régions taurines".
Son texte vise à modifier le Code pénal qui punit déjà la maltraitance animale, mais dont les sanctions prévues à l'article 521-1 "ne sont pas applicables aux courses de taureaux lorsqu'une tradition locale ininterrompue peut être invoquée".
L'élu LFI espère ajouter par amendement l'interdiction des combats de coqs encore autorisés dans le Nord ou certains territoires d'Outre-mer.
- "Foie gras" -
Sa proposition suscite l'embarras dans les groupes politiques, où la liberté de vote est de mise.
Au nom de la défense d'une "tradition culturelle" dans le Sud-Ouest et le pourtour méditerranéen, le gouvernement compte s'y opposer et a missionné la secrétaire d'Etat chargée de la Ruralité Dominique Faure, plutôt que le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti, passionné de corrida.
Devant le groupe Renaissance mardi matin, Mme Faure a appelé à ne "pas opposer émotion et attachement au terroir".
Car le sujet divise les macronistes. En juillet 2021, quand elle n'était pas encore présidente des députés Renaissance, Aurore Bergé avait signé une tribune pour interdire la corrida, jugée "barbare".
Mais en commission, sa collègue Marie Lebec s'est opposée à la "caricature" faite par Aymeric Caron. "Quelle sera la prochaine tradition régionale que nous interdirons ?", a-t-elle mis en garde.
A l'extrême droite, le RN Timothée Houssin a accusé M. Caron "d'extrémisme" par son "agenda antispéciste" qui pousserait à "interdire" demain "foie gras", "balade en poney", "chasse" puis "pêche tout court".
Mais Marine Le Pen, qui fait de la cause animale l'un de ses marqueurs, propose depuis plusieurs années d'interdire la corrida aux mineurs.
A droite, la LR Anne-Laure Blin a reproché à M. Caron de chercher le "sensationnel". Elle a défendu une "culture populaire", un "art et une identité régionale", louant les "milliers de terres sanctuarisées" grâce à "l'élevage des taureaux sauvages".
A gauche, les communistes sont "majoritairement opposés à ce texte de loi" selon André Chassaigne, le PS est partagé, quand LFI et écolos soutiennent l'interdiction.
- Manifestations -
Ce texte a donc peu de chances de passer, d'autant que son examen en totalité est incertain le 24 novembre.
Après des propositions comme le Smic à 1.600 euros ou l'inscription de l'IVG dans la Constitution, il ne figure qu'en quatrième position dans la "niche" LFI, une journée réservée à un groupe minoritaire, avec une clôture des débats à minuit.
"Il faut quand même qu'il y ait du social d'abord dans notre niche !", assume un élu LFI, sceptique sur l'interdiction de la corrida.
D'ici là, des mobilisations sont prévues ce week-end pour ou contre la corrida.
Samedi, des élus de tous bords et aficionados défendront la pratique dans plusieurs villes taurines.
Des associations de protection des animaux promettent à l'inverse de manifester contre la corrida samedi et dimanche, avec "une action à fort impact visuel" annoncée à Paris. Coutumière des vidéos choc, l'association L214 a diffusé des images de "mises à mort laborieuses de taureaux" lors d'une corrida dans les Landes, pour soutenir l'interdiction.
"En dehors de toute considération politique", Brigitte Bardot a apporté son soutien à Aymeric Caron, avec sa fondation.
Et la Société protectrice des animaux (SPA), "extrêmement déçue" par le rejet en commission, réclame un débat complet dans l'hémicycle.
adc-parl/cds/cs/thm
L.Davila--TFWP