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Une dizaine de parents, dont les adolescentes mineures se sont prostituées via le site de petites annonces Wannonce, ont déposé plainte jeudi à Paris pour complicité de traite des êtres humains et proxénétisme aggravé, a-t-on appris de sources concordantes.
Ce site intégralement gratuit, qui revendique 16 millions de visiteurs, permet de mettre en ligne des annonces diverses (animaux, immobilier, vêtements...) mais propose aussi une rubrique "rencontres éphémères", sans aucun contrôle de l'identité ni de l'âge des utilisateurs, pointent les plaignants.
Si les termes "prostitution" ou "service sexuel tarifé" n'apparaissent pas, les photos et les textes qui les accompagnent ne laissent pas de doute quant au fait qu'elles "proposent en réalité un rapport sexuel en échange d'une rémunération", selon cette plainte contre X avec constitution de partie civile.
"Les responsables du site ne peuvent ignorer qu'ils aident la prostitution de ces mineures, de laquelle ils tirent profit, et qu'ils font office d’intermédiaires entre ces dernières et leurs clients", ont souligné Mes Noémie Saidi-Cottier et Matilda Ferey, avocates des parents qui ont porté plainte.
Ceux-ci ont découvert que leurs filles, parfois en fugue, alors âgées de 14 et 16 ans, se sont prostituées via Wannonce entre 2016 et 2021.
Pour eux, le site se rend également coupable d'exploitation pornographique de l'image d’un mineur, de diffusion de messages pornographiques pouvant être vus par un mineur et d'absence de mentions légales obligatoires.
"En toute impunité, depuis des années, les responsables du site font commerce de la misère de jeunes filles en proie à toutes les violences, en toute opacité", a réagi dans un communiqué l'association Agir contre la prostitution des enfants (ACPE), signataire de la plainte.
Les plaignants s'appuient notamment sur une dizaine de condamnations pour proxénétisme, rendues entre 2018 et fin 2021 en banlieue parisienne et dans les Bouches-du-Rhône. Dans ces affaires, les annonces des victimes mineures étaient publiées sur Wannonce notamment.
Sollicité par l'AFP, le site n'a pas répondu dans l'immédiat.
Wannonce - qui ne donne aucune information sur le propriétaire, l'éditeur, l'hébergeur ni l'adresse du siège - dit vivre de la publicité "gérée par Juicyads pour la partie adultes".
"Le fait que la publicité soit spécifiquement ciblée à la rubrique comportant des annonces prostitutionnelles démontre que le site agit en toute connaissance de cause", soutiennent les plaignants.
Nina Delcroix - nom d'emprunt - qui s'est prostituée entre 15 et 17 ans et auteure d'un livre pour dénoncer la prostitution des mineurs, s'est également jointe à la procédure.
"Wannonce c'est très vicieux, c'est un site connu pour la facilité à créer une annonce et de localisation, sans aucune vérification de l'identité", témoigne-t-elle à l'AFP. "En quelques heures, j'avais une centaine d'appels".
"C'est important que l'Etat et la justice comprennent que ces sites sont responsables de beaucoup de souffrance et de vies perdues", poursuit la jeune femme.
Anne (prénom changé) raconte à l'AFP avoir cherché de l'aide auprès de l'APCE quand elle a trouvé des dizaines de messages de clients de Wannonce sur le portable de sa fille de 15 ans, "tombée dans un réseau de proxénètes" après son placement dans un "foyer de l'aide sociale à l'enfance" en 2021.
"Il faut que Wannonce soit fermé. Mais quand il n'existera plus, il y en aura un autre à la place", craint-elle.
J.Ayala--TFWP